Quand Herzog et Rébuffat étaient les meilleurs amis du monde
Nous sommes en 1946. Gaston Rébuffat travaille à l'écriture de son premier livre "L'apprenti montagnard, les cinquante plus belles courses graduées du massif du Mont Blanc". Une idée originale qu'il reprendra avec le succès que l'on sait en 1971 avec la fameuse série des "100 plus belles courses" : descriptions d'itinéraires assorties de considérations rébuffiennes. Il a donc établi une liste de cinquante courses intéressantes qu'il se propose de décrire. Le problème, c'est qu'il ne les a pas toute faites. Normal, il n'a que 25 ans. Alors, il fait appel à quelques amis sûrs qui ont gravi les itinéraires qui manquent encore à sa liste de courses. Maurice Herzog répond immédiatement en fournissant non seulement les renseignements demandés, mais en livrant au passage quelques réflexions sur la montagne et son approche. Avec un commentaire amical : "Tu peux bien sûr compter sur ma discrétion". De fait, il ne revendiquera jamais la paternité de certaines citations intégralement reprises par son ami Gaston. Et pourtant...
Maurice s'est ensuite fendu d'une longue lettre (8 pages) décrivant en détail les courses qu'il avait faites et que Gaston n'avait pas encore faites. Là encore, on retrouve dans "L'apprenti montagnard" des copiés collés. Voici d'abord la suite de la belle lettre de Maurice Herzog à son ami Gaston :
J'ai surligné en page 5 un passage concernant l'ascension de la Brenva. Lui aussi repris in extenso par Gaston Rébuffat, avec une partie entre guillemets :
Le "camarade rentrant de course" n'étant autre que Maurice Herzog. Lequel dès la parution du livre a envoyé un petit mot plutôt sympa :
Alors, que s'est-il passé entre 1947 et 1950 ? Une expédition nationale qui a eu raison d'une belle amitié.
Une précision pour ceux qui s'inquièteraient de la façon dont je traite des documents précieux: ce sont les scans qui ont été surlignés, pas les documents originaux !